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Nous y voilà, déjà la moitié du chemin parcouru depuis mon départ de Paris il y a plus de deux mois. Après presque 5000 kilomètres, j’ai passé la semaine en Normandie, principalement sous la pluie (mais dans un cadre magnifique, comme bien souvent). Une semaine assez mouvementée, ponctuée d’entretiens très variés.
Les quatre Normandies
La journée du lundi est courte mais piégeuse, sous quelques gouttes de pluie et à travers plusieurs segments bien boueux : je chute d’ailleurs pour la première fois du voyage, presque à l’arrêt, sur un chemin sans issue qui se transformait en champ. Après les bosses de la Bretagne, l’Avranchin et le sud du Cotentin sont tout de même assez exigeants, et mon étape du mardi sera sans doute dans le top 3 des étapes les plus poussives. Vent (fort !) de face, quelques bosses, une pluie sans aucun répit, voilà la clé pour une journée un peu galère, la plus lente depuis le début, à travers le bocage normand qui cède en fin de journée la place aux plaines autour de Caen, après un petit passage à Saint-Lô très sympathique. À mon grand regret, je choisis de ne pas faire le détour par les marais de la Manche pour aller au plus vite, il faudra que je revienne !
Mercredi, le vent est toujours là mais il a chassé les gros nuages de pluie. Après la Normandie du bocages et la Normandie des plaines, voici la Normandie du littoral. Accompagné de Clément et de Sylvain, de l’association 33 raisons de rouler, nous pédalons tranquillement au fil des stations balnéaires : Cabourg, Houlgate, Villers-sur-Mer, Deauville… Petite difficulté du jour : la corniche d’Houlgate, très pentue, surtout à jeun et après une bonne pinte de bière. Je passe une partie de l’après-midi sur la plage de Trouville, avec une lumière superbe (“c’est toujours le cas dans le pays d’Auge”)
Jeudi, grand soleil et vent favorable, j’en profite à fond en découvrant la Normandie de la vallée de la Risle, avec ses chaumières à colombages typiques et beaucoup de verdure. Je me trouve dans un département, l’Eure, entouré de grandes villes et de la mer mais tout de même très rural, avec cette impression d’authenticité, de “France d’avant” que j’avais ressentie en Corrèze ou dans la Creuse… à 1h30 de Paris ! Le lendemain, cap vers Rouen en suivant le cours de l’Eure puis de la Seine. Je quitte le monde rural pour le fleuve imposant, bordé d’usines, avec quelques falaises de craie qu’on distingue au loin. Mon étape du samedi est interrompue, malheureusement, par la perte de mon portefeuille : je suis contraint de rentrer pour le week-end à Paris.
Le récap’ des entretiens
Cette semaine 100% normande a été rythmée par cinq rencontres variées : la maire d’une commune nouvelle de 3500 habitants, le secrétaire général d’une préfecture, le maire d’une capitale régionale, un député issu de la société civile et le président de l’Association des petites villes de France.
J’ai conversé avec Aurélie Gigan, maire de Saint-Sauveur-Villages dans la Manche, au sujet de son expérience dans la construction d’une commune nouvelle rassemblant 7 anciens villages. Le problème du nombre record de communes en France et du manque de moyens a été soulevé à de nombreuses reprises depuis le départ, et l’exemple de Saint-Sauveur-Villages montre qu’une fusion, même subie, peut s’avérer bénéfique pour développer les mobilités et donner davantage de leviers financiers.
À Saint-Lô, Laurent Simplicien, secrétaire général de la préfecture de la Manche, m’a partagé sa vision de l’État déconcentré, qu’il juge efficace et disposant des moyens de ses ambitions. Par exemple, les préfectures de département peuvent mettre en place des opérations de revitalisation de territoire avec des villes afin de proposer une requalification d’ensemble de leur centre.
J’ai ensuite rencontré à Caen le maire Joël Bruneau, qui m’a détaillé les points forts de cette ville (très étudiante, proche de Paris et de la mer, avec des industries et des emplois qualifiés) à l’approche de la célébration de son millénaire. Nous avons ensuite discuté du sentiment d’euphorie sur le plan économique qui pourrait régner pendant la période post-crise, masquant de vraies difficultés (liées à la dette, aux évolutions de la démographie, à l’évolution du climat) qui devraient survenir ensuite.
A Evreux, le député Fabien Gouttefarde a évoqué son rôle de terrain (même s’”il y a autant de mandats que de députés”) et m’a présenté les spécificités de son département, à la fois très proche de Paris et plutôt bien relié, mais pour autant peu identifié, peu attractif et mal équipé (le chantier de la fibre est moins avancé que dans les départements ruraux du sud de la France que j’ai visités il y a quelques semaines).
Enfin, j’ai eu un échange très enrichissant avec Christophe Bouillon, qui a abandonné son mandat de député en juillet dernier pour devenir maire de Barentin et président de l’Association des petites villes de France (APVF). Cet entretien m’a permis de comprendre quelques dénominateurs communs dans la relation des petites villes avec l’État (manque d’ingénierie, surcharge administrative) mais aussi le rôle d’une association d’élus en termes de formation (un sujet capital face aux grandes transitions) et de coopération.
Le tour de France continue avec une semaine 100% Hauts-de-France, qui a déjà un peu commencé sous la pluie (je vous en dis plus la semaine prochaine). J’ai pris du retard dans la rédaction de cette lettre d’information car j’ai tenu à rédiger un petit point de mi-parcours, quelques réflexions sans fil conducteur, que vous pouvez lire en suivant ce lien. D’autre part, À portée de roue a fait l’objet de quelques articles dans la presse régionale, notamment ici (dans la Manche) et ici (en Seine-Maritime).
À la semaine prochaine pour de nouvelles aventures cyclistes !
Bosco