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Bonjour à tous,
Je vous écris cette nouvelle page de mon carnet de bord depuis les bords de la Garonne, à Toulouse. Cette cinquième semaine qui vient de s’achever a été très dense, rythmée par quelques imprévus, le long du littoral méditerranéen puis dans les Pyrénées. Je me régale toujours autant à travers des régions que je ne connaissais pas, comme les Corbières et le Couserans.
Entre mer et montagne
Lundi, mardi, mercredi, même refrain : c’est tout plat, je file donc le long du littoral languedocien puis catalan, d’Arles à Perpignan. Je suis ébahi devant les réseaux de canaux et d’étangs construits dans cette région, avec des ouvrages d’arts comme les neuf écluses de Fonseranes à Béziers ou le canal de la Robine. Je joue un peu de musique à Sète en pensant à Georges Brassens, j’observe quelques flamants roses, je m’arrête longuement face aux arènes de Nîmes, après avoir passé plusieurs heures à l’ombre de celles d’Arles le week-end dernier. Je reste vigilant parfois sur les chemins défoncés servant de pistes cyclables. 330 kilomètres de littoral avalés en trois jours, et une étape inoubliable sur la plage des chalets de Gruissan, héritiers des petites maisons sur pilotis qui ont lancé le tourisme balnéaire au milieu du XIXème siècle.
Bon, inévitablement, après avoir bien été mise à l’épreuve sur des petites routes bourrées de trous et parsemées de cailloux, ma roue arrière crève pour la première fois alors que je rentre dans le massif des Corbières. Cela n’entame pas ma bonne humeur alors que je parcours une des plus belles étapes de ce début de voyage, avec plusieurs cols du sommet desquels je peux apercevoir le pic du Canigou en guise de récompense.
Les marges des Corbières, juste avant le Minervois, ressemblent beaucoup à la Provence et je fais halte dans un petit village aux maisons de pierre, Comigne, qui pourrait être du Lubéron (enfin, me corrige un de mes hôtes, “c’est la Provence qui ressemble à ici”). Le lendemain, vendredi, j’ai rendez-vous à Foix pour le déjeuner et compte donc prendre le train pour récupérer de ce début de semaine en roue libre, avant de parcourir la quarantaine de kilomètres jusqu’à mon étape finale, Saint-Girons. Manque de chance, tous les trains sont supprimés, ce qui me permet de traverser l’Aude puis l’Ariège d’est en ouest. Mon déjeuner est annulé mais je ne regrette pas cette traversée parallèle aux Pyrénées, assez magique. J’arrive à Saint-Girons lessivé après une longue étape effectuée au pas de course, au milieu d’une fête et de concerts au bord du Salat.
Le samedi, je découvre le marché de Saint-Girons, élu le plus beau de la région Midi-Pyrénées et en lice pour le titre national, n’hésitez pas à soutenir ce magnifique endroit en votant ici ! Puis nous faisons un tour (en voiture heureusement) du Couserans, et de quelques unes de ses 18 vallées très souvent parcourues par le Tour de France. Sous la brume, je m’émerveille devant le magnifique lac de Bethmale, au cœur d’une vallée qui produit un fromage de lait cru irrésistible et des sabots folkloriques.
Le rôle primordial du département dans les territoires ruraux
Le moins que l’on puisse dire, c’est que les quatre entretiens menés cette semaine ont été extrêmement variés. Lundi, j’ai été accueilli à la mairie de Nîmes par Dolorès Orlay-Moureau, adjointe au maire en charge de la santé, et Xavier Douais, adjoint chargé du tourisme, deux nouveaux élus issus de la “société civile”. Côté santé, nous avons parlé du manque d’organisation de l’Etat dans la gestion du début de la crise alors qu’une ville de la taille de Nîmes possédait l’ingénierie et la souplesse pour pallier cela. Côté tourisme, qui représente 12% du “PIB” de la ville et qui a la particularité d’être géré par une SPL privée, la reprise économique devrait être positive avec une stratégie de diversifier les types de tourisme (la ville construit un palais des congrès face aux arènes de Nîmes pour y développer le tourisme d’affaires d’ici 2025).
À Baillargues, près de Montpellier, j’ai pu échanger avec Céline Guitard, gérante d’une entreprise immobilière, membre du CA de la Fédération française du bâtiment et vice-présidente de la CCI du Gard. Les missions de la CCI (formation des chefs d’entreprise, relais de communication autour des aides de l’Etat, aides à la création d’entreprise) se révèlent primordiales en temps de crise, et cela complète efficacement les mesures d’urgence exceptionnelles mises en place par l’Etat au service des entreprises, dont l’ampleur est unique en Europe.
Vendredi, j’ai échangé longuement au téléphone avec Jean-Paul Ferré, vice-président PS du conseil départemental de l’Ariège, et François Parsi, directeur de l’administration et des finances du conseil départemental, avant de discuter avec eux à Foix. Dans un département pour moitié extrêmement touché par la crise (plusieurs milliers d’emplois dans l’aéronautique ou l’automobile dans la vallée de Foix et Pamiers), pour moitié épargné (la région du Couserans autour de Saint-Girons est peu industrialisée), nous avons parlé des différentes stratégies déployées par le département pour y répondre : la constitution d’un système de réserve constitué après la crise de 2008 pour anticiper les hausses des dépenses liées au RSA, la participation au fonds d’urgence de l’Occitanie, ou encore la délivrance de subventions d’investissement.
Enfin, j’ai organisé un entretien avec Jean-Noël Vigneau, maire DVG de Saint-Girons, en Ariège, duquel je retiens notamment que la région du Couserans a plutôt bien résisté à la crise du fait d’un tissu agroalimentaire important et de la présence de nombreux emplois publics. Nous avons évoqué le rôle de la communauté de communes, qui regroupe 30 000 habitants répartis sur 94 communes, avec 120 conseillers communautaires. 75% du budget de cette collectivité est alloué au fonctionnement, ne laissant que peu de marge à l’investissement. Il s’agit d’un bon exemple d’un des angles morts de la loi NOTRe, avec la création d’une intercommunalité qui n’a pas beaucoup de sens géographique ou social, ni de moyens suffisants, et dépend donc du département, qui lui-même n’a plus de compétence économique. Dans les territoires ruraux, le rôle du département est différent par rapport à ailleurs, puisque c’est le seul échelon qui dispose de moyens et d’ingénierie suffisants pour aider l’action locale.
Une nouvelle semaine en Occitanie m’attend, de long en large : Toulouse, Albi, Montauban, Cahors, Agen, Auch et Tarbes sont au programme. A très bientôt,
Bosco