

Discover more from À portée de roue
Une troisième semaine un peu plus dure que les précédentes. La pluie et le vent s’invitent à la fête, et dans le Limousin et en Auvergne, ça devient un peu compliqué ! La semaine a été très enrichissante néanmoins avec cinq entretiens menés. On rembobine tout ça
PS : J’ai pris le temps de rédiger un premier point d’étape sur mon aventure, que vous retrouverez ici. N’hésitez pas à me faire des retours !
C’est magnifique et terrible
Peu de kilomètres au compteur, mais beaucoup de dénivelé. Et avec plus de 40 kilogrammes à transporter, je commence à sentir l’effort dans les jambes !
En tout cas, j’ai été impressionné par ma traversée de la Corrèze, le plateau de Millevaches verdoyant, les vieilles maisons de pierre et ce sentiment d’abandon en traversant des villages vides. Il faut dire que la Corrèze (80 000 habitants de moins qu’en 1900), comme la Creuse (100 000), ont souffert de l’exode rural tout au long du XXème siècle, et cette déprise démographique est l’un des plus gros enjeux à l’échelle locale, s’ajoutant à un contexte de crise du modèle agricole (exportation de broutards vers l’Italie). Du fait d’un contretemps à Tulle, j’ai pris mon premier train jusqu’à La Souterraine, deuxième ville de la Creuse, avant de traverser le département d’ouest en est. Petit aparté pour les Parisiens qui me suivent : La Souterraine est accessible par un train direct d’Austerlitz en 2h45 (c’est sur la ligne de Limoges et Toulouse), la région est magnifique, et il y a même un itinéraire cyclable faisant le tour du département pour des vacances sportives :)
Jeudi, j’ai passé une journée un peu longue sous la pluie avec vent de face, qui s’est heureusement terminée sous le soleil de Montluçon, où j’ai été accueilli par un ami qui m’a fait découvrir cette très jolie ville. Vendredi, j’ai pris le bus pour ne pas rater mon rendez-vous à Clermont face aux volcans, toujours une vision très imposante. Deux amis m’ont rejoint et nous avons alors traversé l’Auvergne en direction du Puy-en-Velay (spoiler : mes amis n’y sont jamais arrivés ; l’un ayant cassé sa chaîne et l’autre ayant crevé sa roue, ce qui a clairement coupé notre élan le dimanche). Entre la chaîne des Puys et le Livradois, nous avons traversé des paysages incroyables, gravi de belles montées, mais grandement souffert face au vent alors que la Haute-Loire entrait en vigilance orange Météo France (évidemment, on avait le vent de face, on a bien senti les montées et les descentes à 14km/h).
Bref, vive le vélo !
Des rencontres inspirantes
Cette semaine, j’ai eu des discussions passionnantes. D’abord à Limoges, avec le maire LR Emile-Roger Lombertie, avec qui nous avons parlé des facteurs de résilience de la ville face à la crise (absence d’industries vulnérables, présence de nombreuses startups écologiques, filière de la céramique et de la porcelaine en excellente santé) avant de discuter plus largement de notre “société en pleine mutation”, fracturée entre urbains et ruraux (“les urbains ne se rendent pas compte que fragiliser l’agriculture, c’est fragiliser leurs libertés”). A Tulle, j’ai déjeuné avec Alexandre Murat, directeur général des services du département de la Corrèze, qui m’a parlé des difficultés de ce territoire enclavé, qui représente la “France d’avant”. Ces difficultés sont accentuées par l’absence de l’État dans ce territoire (la délégation départementale de l’ARS en Corrèze compte seulement 4 agents, ce qui est bien insuffisant pendant la crise sanitaire) et l’éloignement de la région à la suite de la création de la Nouvelle-Aquitaine en 2016. Les solutions de rebond résident notamment dans la coopération interdépartementale et dans la contractualisation : la Corrèze est le seul département à avoir signé un Contrat de transition écologique avec l’État (alors même que l’environnement n’est pas directement une compétence de cet échelon). Mon tour du Limousin s’est terminé à Guéret où j’ai échangé avec Renaud Nury, secrétaire général de la préfecture de la Creuse, la plus petite préfecture de France. Nous avons notamment parlé du Plan pour la Creuse de 80M€ sur trois ans signé avec le gouvernement, un pacte territorial qui n’existe que dans 12 départements, mais aussi de l’affaiblissement de la présence de l’État à cette échelle à la suite de la réforme de l’administration territoriale de l’État de 2008. Un motif d’espoir : le 8 avril dernier, lors de la Convention managériale de l’État, Emmanuel Macron a annoncé que le département était une maille pertinente et promis la création de 2500 postes de fonctionnaires territoriaux dans les prochaines années pour renforcer cette présence.
Vendredi, j’ai déjeuné avec une vue imprenable sur la chaîne des Puys en compagne de Jean-Yves Gouttebel, président DVG du conseil départemental du Puy-de-Dôme, et quatre membres de son équipe. Un moment d’échange très agréable où nous avons discuté du Master plan du département dans le domaine de la transition écologique et des grands projets réalisés, comme l’inscription en 2018 de la chaîne des Puys au patrimoine naturel de l’Unesco. Nous avons aussi abordé le sujet de l’aide que peut apporter le département, collectivité de grande taille, aux petites communes de son territoire, matérialisée par la création en 2017 d’une agence départementale d'ingénierie territoriale (l'ADIT 63), qui a pour mission d'apporter une expertise technique afin d'aider les communes à monter et réaliser leurs projets, face au retrait de l’État. Cela correspond à la mission de l’Agence nationale pour la cohésion des territoires (ANCT), créée par le gouvernement en 2019. Enfin, cette semaine s’est conclue avec un entretien téléphonique avec Romain Gareau, sous-préfet à la relance d’Occitanie. (Oui, je m’étais mal organisé et avais prévu mon passage à Toulouse le jour de la Pentecôte, nous avons donc organisé cet échange au téléphone et un peu anticipé). Celui-ci m’a décrit en détail la territorialisation du Plan de relance et la qualité du lien entre la préfecture de Haute-Garonne et la région Occitanie dans l’optique de cette relance.
Je sais, je vous avais promis une petite note sur les relations entre les collectivités territoriales et l’État, le sujet pour lequel vous avez voté en majorité la semaine dernière. Je prends beaucoup de retard, puisque en toute honnêteté, je préfère prendre le temps le soir de discuter avec mes hôtes et de me reposer, ainsi que planifier mes prochains itinéraires, rendez-vous et hébergement, ce qui réduit mon temps pour être efficace côté mission. En tout cas, je suis toujours très heureux, malgré la pluie qui devrait bien compliquer ce début de semaine.
À la semaine prochaine !
Bosco