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Seizième semaine : 2-8 août
Deux jours pour relier les deux capitales de la Corse
Cette traversée de la Corse, ce sont des moments mémorables, des coups de pédale parfois (très) difficiles avec une mécanique incertaine du vélo, des montagnes aiguisées, des cochons noirs et des vaches en liberté… Cela restera à part dans mon voyage, une parenthèse encore plus dépaysante que d’habitude (même psychologiquement, le ferry avant et après m’a donné l’impression de changer carrément de voyage).
Je suis donc parti de Bastia lundi en début d’après-midi, sous un soleil de plomb, à l’assaut du col de Bigorno, une ascension longue (25 kilomètres) mais peu pentue au terme de laquelle m’était offerte une superbe vue sur le cap Corse, la mer Tyrrhénienne (celle à l’est de la Corse) et la Méditerranée (au nord).
Dans la descente, un rayon de ma roue arrière casse. Mince, ce n’était pas prévu et il n’y a pas foule de vélocistes sur l’île. Je ne m’étais pas véritablement fixé de point de chute pour le soir, mais je comptais prendre le temps de faire des détours avant Ajaccio d’où je devais prendre le ferry mercredi soir. Pas le choix, je vais devoir faire au plus court en espérant que la roue arrière tienne ! (pour ceux qui ne savent pas, un rayon cassé = une roue qui se voile de plus en plus et qui peut plier voire rompre à tout moment). Prudence dans la descente, puis dans la remontée en plein cœur de l’île dans l’incroyable Scala de Santa Regina, des gorges creusées par le fleuve Golo sur 20 kilomètres. L’ascension jusqu’au col de Vergio (le plus haut col de l’île) dure 45 kilomètres mais je décide de passer la nuit au bord du lac de Calacuccia pour couper la difficulté en deux (et il est déjà assez tard avec toutes ces péripéties).
Après avoir dormi à la belle étoile à côté d’un enclos de brebis corses, me voilà d’attaque assez tôt mardi, avec en plus du rayon cassé le pneu de ma roue avant crevé et un genou gauche toujours douloureux (séquelle de la fin de ma traversée des Alpes…). Bon, c’est parti pour les longs et nombreux kilomètres jusqu’au sommet. Un deuxième rayon qui casse à 9 bornes du col et je me dis que je vais devoir rallier Ajaccio à la marche… Je prie à chaque coup de pédale pour que le vélo et mon genou tiennent, ça le fait avec une magnifique récompense visuelle au Vergio. Longue descente les deux mains sur les freins puis un petit col bien sec, le Févi, en haut duquel je croise plein de cochons noirs en liberté trop choux (dommage qu’on les mange).
Je descends ensuite looongtemps jusqu’à la plage. Il est midi, le soleil tape très fort, je ne suis plus très loin d’Ajaccio : le terrible col de San Bastiano me barre la route. Il fait moins peur que ce que j’ai traversé précédemment, mais cela restera comme la plus dure épreuve de cette traversée de la Corse : 7 kilomètres assez pentus (6-7%) sur une route fréquentée, avec une température trèèès élevée et un genou qui me fait crier de douleur à chaque coup de pédale…
Bref, pas peu fier d’atteindre Ajaccio un peu plus de 24 heures après mon départ de Bastia, même si je ne parviens pas à trouver de quoi réparer le vélo… J’espère avoir plus de chance sur le continent ! Même si je suis déçu de n’avoir pas fait les détours souhaités, je garde en tête des paysages somptueux et je compte bien revenir à vélo ou à pied sur cette belle île au plus vite !
Le récap’ de l’entretien
Un seul entretien cette semaine, passionnant, avec Jean-Louis Santoni à Bastia. Désormais déontologue de la Collectivité de Corse (CdC), M. Santoni a été le premier directeur général des services de la CdC après avoir orchestré la fusion ayant abouti en 2018 à cette collectivité à statut particulier. La CdC est en effet la fusion des deux anciens conseils départementaux (Haute-Corse et Corse-du-Sud) avec l’ancienne collectivité territoriale de Corse (équivalente des conseils régionaux mais qui possédait déjà des spécificités). Nous avons donc parlé des avantages de cette fusion (par exemple, le soutien aux entreprises en complément de l’État pendant la crise sanitaire a été grandement facilité) et des obstacles qui s’étaient dressés (les élus du bloc communal critiquent l’éloignement des élus de la CdC, désormais élus sur liste comme les conseillers régionaux, et non dans les cantons comme cela a été maintenu dans un autre exemple de fusion, la collectivité européenne d’Alsace, et par ailleurs l’ancien président du conseil départemental de la Corse-du-Sud s’opposait farouchement à la fusion ce qui a compliqué les négociations). M. Santoni a également questionné l’aspect philosophique de la décentralisation en expliquant qu’il n’était plus possible de poursuivre les vagues de décentralisation sans passer par un grand débat national sur le mode d’organisation souhaité par les citoyens français.
Depuis mercredi et jusqu’au lundi 9, À portée de roue est en vacances ! Quelques jours sous le soleil provençal pour un bel événement familial et on se retrouve pour la dernière ligne droite jusqu’à Paris dès mardi ! En attendant, je vous laisse avec un petit article paru dans Nice Matin et dans Var Matin lundi, à la suite d’un entretien au Café du Cycliste sur le port de Nice (ça ne s’invente pas !).
Ciao et belle semaine,
Bosco